La boîte noire
Véritable
OVNI dans les daubes habituellement produites chez Europacorp. Enfin
daubes, daubes... ça serait un jugement un peu (beaucoup) trop hatif
que de jeter chaque productions Europacorp. Car franchement comment
nier l'efficacité d'un Le baiser mortel du dragon ou le comique d'un 15
août
? Si leurs qualités restent sujettes à débat, elles ont au moins le
mérite de trouver leur public. Malheureusement la diversité n'était
pas le fort de la boîte, et entre film d'action et film d'action, la
société peinait à se renouveller. C'est désormais chose faite avec le
plutôt très réussie La boîte noire de Richard Berry. Film ambitieux,
prétentieux (habituellement c'est un défaut mais c'est tellement rare
dans le cinoche français misérabilisme que ça en devient une qualité)
et surtout réussie. Dommage qu'il soit quasimment condamné à l'échec, et
ça ne peut que renforcer mon opinion sur une chose : Europacorp. veut
changer. ça plus le prochain Tommy Lee Jones et le retour de Besson à
la réalisation, la société au jolie logo cherche à se racheter une
image de marque, en arrêtant de produire produit calibré sur produit
calibré. Parlons-en de calibres avec La boîte noire justement. Quel
public ? Quel âge ? Quelle catégorie ? Mystère total. Plutôt que de
gâcher l'intrigue, l'équipe marketing a préféré faire une bande-annonce
certes efficace, intriguante, et par ricochet donnant envie d'en voir
plus - donc le film - mais au demeurant extrêmement austère, et son
absence de clarté quand à son statut ne peut que faire fuir bon nombres
de spectateurs. Une chose est sûre, La boîte noire surprend, même pour
ceux qui ont lu la nouvelle (puisqu'elle n'occuppe que la première
partie du film).
On pourrait critiquer au film beaucoup de choses :
des effets spéciaux pas si réussies, une tendance un tantinet trop
prononcée à vouloir allez vers le spectaculaire, l'évènementiel, le
dramatique ultime (on se croirait dans du Lynch à certains moments),
mais le simple fait que ce soit un film français lui pardonne tout,
même son énorme manque de rythme et sa fin très facile et pas du tout
prévisible deux heures à l'avance.
José Garcia est époustouflant, le
reste du casting n'est pas en reste, et propose par ailleurs de bien
belles têtes d'affiches là encore sacrifié par le marketing au profit
de l'histoire.
Richard Berry, en plus d'être un excellent acteur,
est un très bon réalisateur, sa réalisation en parfaite adéquation avec
le sujet, ses angles toujours plus spectaculaires, des effets toujours
plus "choc". A noter la très belle photo du film.
Si La boîte noire
n'est pas un chef-d'oeuvre - loin de là - de par ses multiples défauts
de rythme et de scénario, il n'en demeure pas moins un hônnète
divertissement, mais surtout il annonce un certains changement dans le
cinéma français : un cinéma ambitieux, qui n'a plus peur de grand
chose, ne se passant plus exclusivement à Paris (ça change), et un
nouveau pas vers ce monde merveilleux qu'est la littérature française,
proposant suffisamment de consistance pour combler les trous actuels.
A
noter aussi l'apparition, dans le film, de Pierre-Ange Le Pogam
(producteur de Michel Vaillant entre autres) dans le rôle du patron
véreux exploitant ses employés, un sens de l'auto-dérision évident de
la part d'Europacorp.